Amiante : Jean Ropars et Philippe Henry évoquent leurs actions au sein de l’ADDEVA en tant que représentants CFDT

Publié le 18/10/2019

Le 5 avril dernier, la Cour de cassation étendait à tous les salariés exposés à l’amiante, la possibilité de faire reconnaître leur préjudice d’anxiété. Une avancée pour ces salariés puisque jusqu’à lors, la réparation de ce préjudice n’était possible que pour les salariés ayant travaillé dans un établissement classé « amiante ». Dans le Finistère, l’Association Départementale de Défense des Victimes de l'Amiante (ADDEVA) se bat, depuis 20 ans, pour faire reconnaître le préjudice subi par ces salariés et obtenir des indemnisations. Jean Ropars et Philippe Henry, représentent la CFDT dans cette association, respectivement depuis 20 ans et 7 ans. Ils évoquent leur rôle de mandatés et les actions qu’ils mènent auprès de ces salariés et de leur famille.

Philippe, Jean, pouvez-vous revenir sur les origines de la création de l’association ADDEVA ?

Jean : En 1974, Henri Pézerat a été lanceur d’alerte pour l’amiante à la Faculté de Jussieu. Suite à cette alerte, l’ANDEVA est créée en 1996 et en 1999, l’ADDEVA 29 a été créée qui est une déclinaison territoriale. L’association a obtenu des avancées pour ces salariés avec la reconnaissance des maladies professionnelles provoquées par l’amiante, la faute inexcusable de l’employeur, la création du fonds indemnisation des victimes de l’amiante et le suivi post-professionnel.

A quel moment, commencez-vous à représenter la CFDT au sein de l’association ?

Jean : Les organisations syndicales étant représentées au niveau national, cette possibilité a été donnée à la CFDT au niveau départemental. Comme je travaillais à l’Arsenal, un milieu professionnel très exposé à l’amiante, j’ai été mandaté par la CFDT pour la représenter au sein de l’association dès sa création Cela fait donc 20 ans que j’y suis, dont 18 ans en tant que représentant titulaire. J’ai ainsi pu suivre l’évolution des avancées obtenues pour les salariés.

Philippe : Quant à moi, j’ai intégré l’association en 2012, en tant que suppléant. Depuis 2 ans, j’ai pris le relai de Jean en tant que titulaire.

Quel est votre rôle au sein de l’association en tant que mandaté ?

Jean : La CFDT est membre associé. Nous ne pouvons pas voter au sein du Conseil d’Administration mais nous avons le droit de donner notre avis et de discuter. La CFDT est reconnue et a de très bonnes relations au sein du Conseil d’Administration.

Philippe : Nous assurons également des permanences tous les 15 jours au sein de l’association. Nous aidons les victimes à monter les dossiers d’indemnisation et nous vérifions que tous les dossiers sont complets avant de les transmettre à l’avocat. L’avocat assure le suivi et nous fait retour des décisions prononcées.

Jean : Avec l’expérience, on sait si les personnes pourront avoir gain de cause. Même si quelque fois on peut être surpris des avis rendus. Mais il n’y a pas énormément de rejet.

Vous côtoyez des personnes malades, des familles en deuil. Est-ce qu’à certains moments ce n’est pas trop lourd à porter ?

Jean : J’avoue qu’au début de mon mandat, j’ai été secoué face à la maladie. Nous avons été accompagnés par la Ligue contre le Cancer pour faire face. A l’Arsenal, une personne sur deux a été exposée à l’amiante et certains services plus que d’autres. J’ai fait les mêmes tâches que certains de mes collègues, dans les mêmes lieux, et je n’ai rien eu alors que certains d’entre eux ont développé des maladies. C’est la loterie. Mais on trouve du sens aussi dans ce mandat. On aide des familles avoir gain de cause, à obtenir des indemnisations. Et puis, notre action oblige les entreprises à mettre en place des plans de prévention. La complexité réside aussi dans l’évolution des lois et de comprendre les différentes instances qui interviennent dans le traitement d’un dossier.

Philippe : Pour ma part, en une année, j’ai perdu trois copains. Il y a moins de déclarations concernant l’apparition de plaques pleurales mais plus de déclarations de mésothéliome qui provoquent des cancers du poumon, du péricarde ou du larynx. Ce sont des maladies qui peuvent se déclarer 30 ans après la première exposition. On estime que l’exposition à l’amiante provoquera 100 000 morts en France.

L’extension du préjudice d’anxiété va certainement augmenter les demandes ?

Jean : Oui, nous avons constaté une hausse des fréquentations. En 2019, l’Addeva a reçu 762 personnes. Elle compte 1450 adhérents avec une majorité d’adhérents qui viennent du secteur privé. Je pense que certains secteurs professionnels sont mal suivis et les salariés ne font pas les démarches d’indemnisation auxquelles ils pourraient prétendre. Je pense notamment aux garagistes qui soufflaient dans les garnitures de frein. Il reste donc encore du travail. Mais il y a des avancées avec récemment une nouvelle extension du préjudice d’anxiété aux salariés exposés à d’autres toxiques que l’amiante.

Philippe : Oui, le but est que les dégâts liés à l'amiante ne se reproduisent plus et cela passe par l'amélioration des conditions de travail.

Merci à tous les deux pour votre engagement.