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La CFDT obtient un CSE commun pour les 1500 salariés de la Fédération ADMR du Morbihan

Publié le 07/11/2023

C’est une belle victoire syndicale pour le syndicat Santé-sociaux du Morbihan. Après avoir obtenu la création d’un CSE commun pour le réseau des Aides à Domicile en Milieu Rural (ADMR) du Morbihan, la CFDT a remporté une large majorité des sièges de ce CSE lors de leurs premières élections professionnelles en juin 2023. C’est aussi un magnifique exemple d’implantation et d’action syndicale pour renouer une communauté de travailleurs éclatée à travers une cinquantaine d’établissements sur le département.

De gauche à droite : Fabienne Dubos, Didier Lestang et Véronique Dheurle

C’est une constellation qui recouvre le département. La Fédération ADMR du Morbihan est composée d’une cinquantaine d’associations sur l’ensemble du territoire qui emploie environ 1500 salariées. Après 2 ans de bras de fer entre la Fédération et la CFDT, le tribunal judiciaire de Vannes a validé la création d’un Comité Social et Économique (CSE) commun pour les 51 associations. Une petite révolution pour ce réseau d’ADMR dont les statuts remontent à 1955. 

Forte de 61 adhérents, la section CFDT a remporté 13 sièges sur 15 avec 76,67% des voix face à la CGT lors de ces premières élections professionnelles en juin 2023. Ce réseau d’auxiliaires de vie illustre parfaitement ce phénomène d’éclatement des communautés de travail dans certains secteurs d’activité, notamment dans le cas d’établissement multi-sites. Face à cet éparpillement, à quel niveau les salariés sont représentés ? Et comment peuvent-ils faire entendre leur voix ? « C’est une bataille que le syndicat CFDT Santé-Sociaux du Morbihan mène depuis 5 ans avec la Fédération d’ADMR », indique Fabienne Dubos, auxiliaire de vie et déléguée syndicale de la section depuis juin. 

Chaque association emploie entre 10 et 40 salariées et était autonome et responsable de sa propre politique salariale. Une situation qui complique fortement la représentation collective des salariés. « Certaines associations avaient un ou deux représentants dans un CSE local », témoigne Fabienne Dubos, « mais c’était des CSE bidons car les employeurs locaux sont souvent des bénévoles qui connaissent mal le droit du travail et qui finissent par demander l’avis de la Fédération. Un va et vient qui pouvait durer des mois sans qu’on ait un vrai interlocuteur. » Ce système d’autonomie brouille les frontières dans la responsabilité de la gestion des emplois, des conditions de travail et de la rémunération. « C’est diviser pour mieux régner », affirme Fabienne. 

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Une instance centralisée pour « renouer » la représentation collective des salariés 

Pour les salariés, les conséquences de cet éclatement de la politique salariale sont multiples. « On pourrait presque dire qu’il y a cinquante-et-une manières d’appliquer les règles du droit du travail » avance la déléguée syndicale, qui travaille dans le réseau depuis 5 ans. Non-respect des règles en matière d’amplitude horaire et d’heures supplémentaires, différence d’échelon (donc de rémunération) pour un même poste sur la convention collective de branche, différence d’avantages en chèques cadeaux de fin d’année… La liste est longue. « Il peut y avoir de fortes disparités entre 2 sites à 20km de distance », précise-elle. « Ce que l’on demande, c’est que les 1500 salariés du réseau soient logés à la même enseigne. » 

Les instances centralisées comme les Unités Économiques et Sociales (UES) sont conçues pour structurer le dialogue social au-delà du périmètre de l’établissement, et peuvent être une solution pour « renouer » les collectifs de travail éclatés. Mais leur mise en place reste une prérogative de l’employeur. En 2021, le syndicat CFDT Santé Sociaux du Morbihan a demandé la création d’une UES à la Fédération d’ADMR « dans l’objectif d’harmoniser les pratiques entre toutes les associations, et que les salariés des plus petites d’entre elles soient représentés. » Face au refus de la direction, le syndicat a lancé une procédure devant le tribunal judiciaire de Vannes. 

Une procédure longue et un travail titanesque, car il faut prouver l’existence d’une unité économique et social pour les 51 associations, ainsi qu’une concentration des pouvoirs de direction au sein de la Fédération. « Nous nous sommes appuyés sur le réseau de la CFDT, avec le cabinet d’avocat LBBa, partenaire de la CFDT Bretagne, pour démontrer la concentration des pouvoirs à travers l’existence de services généraux communs à l’ensemble des associations : service comptabilité, service juridique, services opérationnels », précise le syndicat. Après une première victoire en 2022, puis une confirmation en appel en janvier 2023, le tribunal a donné raison au syndicat Santé-sociaux en reconnaissant l’existence d’une UES et en ordonnant la création d’un CSE commun pour les 1500 salariées. 

 

Développer le syndicalisme dans une communauté de travailleurs éclatée 

« Globalement, les salariés sont satisfaits de la procédure. L’action de la CFDT a aussi généré de nouvelles adhésions », affirme Fabienne. Il n’est cependant pas toujours aisé de mettre en lien les salariés des différentes associations. D’autant plus qu’en l’absence d’espace dédié, certains salariés d’une même association n’ont pas toujours l’opportunité de se retrouver pour échanger. « Comme ils sont éloignés, tous les salariés n’ont pas perçu leurs intérêts communs avec ceux des autres structures. Nous avons dû faire preuve de pédagogie pour expliquer les bienfaits de la démarche. » 

De nombreux chantiers attendent Fabienne et son équipe : harmoniser par le haut la politique salariale des 51 associations, travailler sur l’organisation du travail notamment au niveau des amplitudes horaires, agir sur la pénibilité au travail pour prévenir les accidents… « Mais surtout, recréer du lien entre les salariés ! Nous sommes conscients que c’est notre difficulté, ce sera un axe principal de travail », assure l’auxiliaire de vie. Les élus vont suivre une formation sur le fonctionnement du CSE et sur la conduite des négociations avec l’Institut de formation syndicale de la CFDT Bretagne, l’Ifreb. 

Pour le développement syndical dans la Fédération ADMR, la section souhaite se faire accompagner par le réseau d’accompagnement ARC (Accompagnement, Ressources, Conseils) de la CFDT Bretagne. Chargé de mission dans le Morbihan depuis 2022, Loïc Boudard maîtrise le sujet : « la première chose à faire dans un contexte comme celui-ci, c’est un atelier de structuration de la section pour travailler efficacement en dépit de la dispersion des établissements. » L’ARC est aussi en mesure de les accompagner dans la mise en place de leur communication interne pour sensibiliser les 1500 salariés.  

 

Heureusement, l’équipe de Fabienne ne manque ni de forces vives, ni de bonne volonté. « Avec les suppléants, nous sommes 22 au CSE, dans des associations différentes », rappelle cette dernière, « on va commencer par nos associations en servant de relais. Ensuite, on ira à la rencontre des autres pour informer les salariés sur l’action de la CFDT ! »