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École de Commerce de Rennes : les NAO 2023 marquent une éclaircie dans un dialogue social très dégradé

Publié le 05/12/2023

Fin octobre 2023, les élus CFDT de la « Rennes Business School » (RBS) ont signé un accord des Négociations Annuelles Obligatoires (NAO) pour la première fois depuis quatre ans. Avantageux pour les salariés, cet accord apparaît comme un signe de bonne volonté de la part de la direction de l’École, après une longue période de discriminations syndicales et d’entraves au CSE. Rencontre avec Thomas Mcnamara, délégué syndical CFDT de l’établissement.

Pour la section CFDT de l’École de Commerce de Rennes, maintenir la présence du syndicalisme dans l’établissement est un combat permanent. Fondée en 1990, la « Rennes Business School » est une école internationale de management qui emploie environ 300 salariés et accueille 5500 étudiants. Seulement, cette culture internationale à l’image des grandes écoles américaines « ne fait pas toujours bon ménage avec le droit du travail français », souligne Thomas Mcnamara, délégué syndical de la section. 

Élu représentant du personnel en 2016, cet enseignant en gestion de flux logistique a repris en main la section malgré les pressions de la direction sur le personnel. « Je me suis engagé après le licenciement abusif d’un collègue, c’était un déclencheur pour moi », explique Thomas, « depuis, nous avons doublé notre nombre d’adhérents, nous avons aujourd’hui un taux d’adhésion compris entre 10 et 20%. » Quasiment un exploit face à tout ce qu’ils ont dû endurer.  

 

Apprendre à penser hors du cadre… du code du travail 

Intimidation, diffamation, menaces de licenciement… rien n’aura été épargné pour décourager les militants. Heureusement, l’inspection du Travail a débouté la procédure de licenciement engagée contre Thomas Mcnamara, cette dernière ne reposant sur aucun élément. Pour autant, la direction a multiplié les délits d’entrave au CSE, « et certains élus n’osent même pas prendre leurs heures de délégation car c’est très mal vu », ajoute le délégué. Plusieurs procédures judiciaires sont en attente de jugement.  

Pas de quoi dégouter Thomas, originaire de la ville de New York aux États-Unis, qui fait preuve d’une grande résilience : « c’est inscrit dans mes valeurs, dans mon histoire familiale, je ne supporte pas les injustices. Si je sais que mes arguments sont justes, je ne peux pas laisser tomber mes collègues. » L’enseignant peut aussi compter sur le soutien de son équipe CFDT au quotidien. 

Concernant les conditions de travail, le bilan n’est guère plus reluisant. « Avec le CSE, nous avons sollicité un audit social auprès du Cabinet d’expertise Syndex, partenaire de la CFDT Bretagne, dont le rapport pointe de nombreux dysfonctionnements, notamment de la part de la direction », affirme l’enseignant. Le CSE a aussi lancé plusieurs alertes concernant les risques psychosociaux pour le personnel. Le taux de turnover des salariés atteint 50% tous les 3 ans.  

« Penser en dehors du cadre » cette devise affichée par la Rennes Business School est aussi appliquée vis-à-vis du droit du travail. « Nous sommes régulièrement sollicités pour défendre des salariés menacés de licenciement abusif. Plusieurs procédures aux Prud’hommes sont en cours ou ont déjà eu lieu », ajoute Thomas, scandalisé. 

 

La persévérance finit par payer 

Après 4 ans de désaccords sur les NAO, la CFDT a réussi à négocier un accord satisfaisant pour les salariés. «Un effort bienvenu au vu du dialogue social catastrophique et du niveau de l’inflation », commente l’élu CFDT. L’accord comprend une augmentation de 4,5% sur les salaires bruts, attribuée aux salariés dont la rémunération mensuelle brute, équivalent temps plein, ne dépasse pas 3235€, à partir du 1er novembre 2023. À cela s’ajoute une prime de partage de la valeur de 800€ pour les salariés de plus d’un an d’ancienneté (400€ pour les salariés entre 6 mois et un an) avec un plafond salarial annuel équivalent temps plein équivalent à 2 fois le Smic.  

Mais aussi, une enveloppe d’augmentations individuelles répartie proportionnellement entre les femmes et les hommes pouvant être dirigée pour réduire les inégalités professionnelles par genre pointées par l’audit de Syndex. Un premier pas pour faire disparaitre ces inégalités, mais insuffisant pour le délégué CFDT : « nous avons besoin d’une grille de salaire avec des augmentations fixes et garanties pour supprimer ces écarts intolérables ». 

Thomas reste optimiste pour l’avenir. L’arrivée d’un nouveau directeur général en janvier 2024 laisse espérer une amélioration du dialogue social au sein de l’École. « C’est dans notre intérêt à tous », insiste Thomas. Ce dernier pointe que les mauvaises conditions de travail et le climat social de l’école ont entrainé une chute importante de la RBS dans le classement des Écoles de Commerce. Malgré tout, Thomas et son équipe continueront de privilégier le dialogue social pour faire bouger les lignes : « notre organisation syndicale nous donne de la crédibilité. Nous restons déterminés et nous allons continuer de travailler pour soutenir les professeurs, les salariés administratifs et avancer ensemble. »