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Le syndicat breton des livreurs de repas a fait le plein d’adhérents en 2023 !

Publié le 07/11/2023

À l’approche de leur dernier conseil d’administration de l’année, l’association de livreurs de repas Coursiers Autonomes de Bretagne dresse un bilan positif de sa tournée régionale de développement. L’occasion de lister les priorités pour 2024 et d’analyser les tendances de ce secteur d’activité, alors que la grogne monte chez les livreurs face à la nouvelle politique de rémunération d’Uber Eats.

Six mois après le début de leur tournée régionale de développement, le collectif de livreurs de repas tire les enseignements de son activité. Et ils sont plutôt positifs !   

Parrainée par la CFDT Bretagne, l’association accompagne déjà 300 livreurs sur l’ensemble de la région et enregistre désormais 75 nouveaux adhérents en l’espace de six mois. Ces nouveaux adhérents exercent leur activité à Rennes, Vannes, Brest, Lorient, mais aussi hors région. « Le rayonnement du CAB dépasse largement la Bretagne puisque nous avons des adhérents de Normandie et de Loire Atlantique à Angers, Cholet, Tours, Rouen », annonce avec fierté Joseph Atangana, président de l’association. « Il y a même un livreur qui m’a appelé depuis Aix en Provence », sourit ce dernier. 

L’activité de cette jeune organisation syndicale ne fait que s’accroître. Presque chaque semaine, Joseph Atangana tient une permanence pour assurer une médiation entre les livreurs et les plateformes Uber Eats et Deliveroo qui font appel à leurs services. « Auparavant, il y avait une dizaine de personnes à chaque permanence. Aujourd’hui, ce nombre a doublé », assure Joseph. Pour le président du CAB, le but de l’association est que les livreurs repartent des permanences « avec un plus grand sourire que lorsqu’ils y sont entrés. » 

 

Un jeu de poker menteur permanent 

Les livreurs des plateformes ont grand besoin d’un collectif soudé. Le 31 octobre 2023, le syndicat national Union-Indépendant, auquel le CAB est rattaché, a publié un communiqué fustigeant la nouvelle politique de rémunération de la plateforme Uber Eats qui ferait baisser de 10% à 40% le chiffre d’affaires des livreurs. Ce nouveau système d’abord mis en place dans 3 villes du nord de la France, doit s’étendre au reste du territoire dans les jours à venir et concerner près de 65 000 livreurs. 

« On ne comprend rien à cette nouvelle rémunération qui a été décidée sans aucune concertation », réagit Joseph Atangana. Face au manque d’éléments lisibles sur cette nouvelle grille, une seule chose est sûre pour le président du CAB : « cela fait déjà un bon moment qu’Uber ne respecte plus la grille de rémunération qu’il affiche publiquement, ne serait-ce qu’avec la mise en place du système des triples-commandes. » Devant ce manque de transparence d’une rémunération pilotée par algorithme, Union-Indépendant n’a d’autre choix que d’essayer de développer son propre algorithme pour avoir des éléments de comparaison concrets. 

« Finalement, c’est très aléatoire, il peut y avoir des mauvais prix sur une zone pendant une ou deux semaines, puis les prix remontent quand il y a de la grogne chez les livreurs. C’est un jeu de poker menteur permanent », décrit Joseph. Une concertation est en cours parmi les livreurs affiliés au syndicat Union-Indépendants dans l’éventualité de mener un mouvement de grève. Cette nouvelle politique d’Uber Eats intervient alors que le premier accord national d’un revenu minimum horaire de 11,75€ négocié par les syndicats de livreurs entre en application ce mois d’octobre 2023. 

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Le modèle du livreur indépendant toujours d’actualité 

Malgré les difficultés croissantes, le modèle du travailleur indépendant défendu par les Coursiers Autonomes de Bretagne n’est pas complètement remis en cause. Si ce n’est pas encore aujourd’hui que l’on verra un livreur qui puisse vivre complètement de son activité, aucun de ceux rencontrés par le CAB ne souhaite passer sous le statut de salarié. « Pour l’heure, la livraison est devenue très intermittente en France. C’est un complément d’activité : certains prennent un job le matin et livrent le soir », constatent les livreurs de l’association. 

Une situation qui ne durera pas. Plusieurs échéances à court et moyen terme viendront rebattre les cartes de ce secteur d’activité. En 2026, la loi Française va contraindre les plateformes à communiquer les chiffres d’affaires des livreurs qui travaillent pour elles à l’Urssaf avec un prélèvement de l’impôt à la source à l’horizon 2027. « Cela va probablement réduire le nombre de livreurs car l’activité sera moins attractive, mais ceux qui poursuivront seront moins précaires », analyse le président du CAB. « D’autre part, la poursuite du dialogue social national nous permettra d’obtenir des avancées pour professionnaliser le métier et obtenir des garanties supplémentaires. » 

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Rencontre avec les livreurs de Lorient, le 28 octobre 2023.

Militantisme et sécurité… des priorités pour 2024 

Pour 2024, les priorités des Coursiers Autonomes de Bretagne sont claires. « Comme notre existence est encore toute récente, nous sommes beaucoup dans un syndicalisme de service. C’est difficile d’avoir des personnes qui viennent vers nous quand ils n’ont pas de problème », explique Joseph Atangana. Le syndicaliste cherche à conscientiser les adhérents pour les transformer en militants. « Au-delà des problèmes courants, c’est la syndicalisation qui fera la force de notre collectif et de nos revendications dans le cadre du dialogue social avec les plateformes ». 

Enfin, une autre priorité de l’association est de travailler sur la sécurité des livreurs et leur couverture en cas d’accident. En statut d’auto-entrepreneur, la disparition du contrat de travail fait des livreurs les seuls et uniques responsables de leur sécurité. Accidents de la route, agressions, … les facteurs à risque sont multiples. Le 27 octobre dernier, un livreur est décédé à Limoges dans le cadre de son activité, renversé par une voiture. Ce drame, traité comme un fait divers dans la presse, porte à 22 le nombre de livreurs de repas décédés lors d’un accident du travail depuis 2019.